Le mécénat financé par l'AAMEC Le mécénat financé par l'AAMEC
Dès sa naissance en 1930, la mission de l’AAMEC est :
« Organiser des rencontres culturelles dont les bénéfices seront utilisés à des fins de financement d’acquisition d’œuvres nouvelles ou de restauration ».
Christelle Rivalland, la directrice du musée Ernest Cognacq détaille ce que la générosité des adhérents a permis de réaliser .
Elle nous confie les critères qu’elle retient pour sélectionner des œuvres dont l’acquisition compléterait parfaitement ses collections.
Il est difficile de quantifier les acquisitions financées par l’AAMEC depuis sa création en 1930. Un listing est réellement tenu depuis 1990, date à laquelle un personnel scientifique a été mis en place dans la structure du musée. Cela correspond également au « réveil » des Amis du musée quand M. Coudé du Foresto, puis le général Barthes ont relancé l’association. Globalement, depuis cette période, on peut estimer à environ 120 acquisitions d’œuvres et d’objets.
Après une période difficile, dûe en particulier à la crise sanitaire qui a ralenti les possibilités d’achat, le rythme s’est accéléré en 2024. En 2023, nous avons été malchanceux dans les adjudications en salle des ventes avec des prix qui se sont envolés pour des œuvres dont le cours au regard du marché n’était pas cohérent . En concertation avec Hugues Riedinger, président de l’AAMEC et le ministère de la Culture, nous nous sommes entendus sur le principe de ne pas franchir certaines limites. Parfois, des acheteurs surcotent des offres qui objectivement ne valent pas le prix atteint. Déontologiquement il n’est pas question d’entrer dans un jeu de surenchère commerciale.
Nous avons développé plusieurs axes de politique d’acquisition sur trois grandes catégories que nous cherchons à développer dans nos collections : beaux-arts, fortifications et histoires pénitentiaires.
- Fortifications : tout ce qui va avoir trait à l’enjeu stratégique du site de Saint-Martin de Ré, la construction et bien sûr Vauban pour lequel nous faisons feu de tout bois. Il nous manque, par exemple, un portrait peint de Sébastien Le Prestre, marquis de Vauban. Nous nous étions positionnés sur une copie originale de Hyacinthe Rigaud, le grand peintre du règne de Louis XIV, par Ricardeau. L’œuvre avait été estimée à 7000 €. Elle est partie à 18 000 € ! Cependant, nous sommes très heureux que l’AAMEC ait financé récemment l’acquisition d’un buste contemporain pour un montant beaucoup plus modeste (484 €). Il nous manque aussi des armes pour évoquer les batailles. Nous ne possédons ni mousquet, ni pistolet. Enfin, des représentations de prise de siège, de la citadelle…
- La deuxième thématique est l’histoire pénitentiaire martinaise. Nous nous intéressons particulièrement à la création artistique des bagnards pendant leur détention. Nous possédons plusieurs œuvres réalisées dans les années 30. Par exemple, la peinture des îles du Salut (ci-dessus) qui vient d’être restaurée. Nous avons étendu les collections à des œuvres des années 60 des détenus de l’OAS comme le vase réalisé à la citadelle. À terme, nous aimerions tirer un fil vers des périodes plus récentes. Nous souhaitons en effet montrer la diversité des supports de la débrouille car les bagnards détournaient tous les objets de leur quotidien : peintures sur des toiles à matelas ou des vareuses, rostres de requin scie… Il nous manque des assiettes en tôle peintes qui étaient découpées dans des bidons d’huile ou des barils d’essence.
- La dernière thématique que nous recherchons est celle des expéditions de Nicolas Baudin, un personnage très important pour le territoire. Nous avons peu de matériel pour l’illustrer, simplement la maquette de son bateau, Le Géographe. Nous aimerions acquérir des illustrations de son expédition sur les côtes australiennes qui a eu lieu de 1800 à 1804. Avis aux amateurs !
Nous suivons des artistes originaires ou qui ont produit sur l’île de Ré qui manquent à notre fonds ou y sont peu représentés. Nous aimerions par exemple acquérir d’autres Gaston Balande ou de Christian Couillaud (ci-dessous) car nous possédons peu d’œuvres de ces peintres. Pour les suivre, nous sommes en lien avec des collectionneurs ou des antiquaires, en particulier François Morand qui s’est pris d’une véritable passion pour les peintres du bagne. Il s’est constitué une collection personnelle dont beaucoup de pièces figurent dans l’exposition : « Peindre le bagne » (6 juillet au 3 novembre 2024). Nous nous sommes rencontrés car il cherchait des dessins. Depuis, il a le réflexe de m’appeler dès qu’il trouve une œuvre ayant trait à l’île de Ré. Il nous a entre autres vendu un Giraudeau que nous allons recevoir très bientôt. C’est essentiel de se constituer un réseau de confiance.
Sur Internet, nous sommes inscrits sur des sites de vente en ligne et recevons des alertes grâce aux mots-clés (nom de peintre ou thématique…) : Suire, Vauban, siège, stratégie militaire… que nous avons indiqués.
Quand nous repérons une acquisition potentielle, nous nous tournons vers Hugues Riedinger qui sollicite le conseil d’administration de l’AAMEC. Si la réponse est favorable, nous demandons l’autorisation de la Drac et des grands départements du service des Musées de France pour savoir s’il juge l’acquisition intéressante. En cas de réponse négative, nous abandonnons l’achat.
L’anecdote la plus parlante est celle de l’enseigne de l’usine à engrais marins (ci-dessous) qui date du début du XXe siècle. Elle a été miraculeusement sauvée de la déchetterie de Saint-Clément par une donatrice, Line Mailhé. Après avoir conservé dans son grenier ce grand tissu roulé, elle nous l’a apporté. C’est un témoignage exceptionnel de l’histoire industrielle de l’île de Ré. Il était malheureusement dans un état catastrophique et a bénéficié d’une importante campagne de restauration financée par l’AAMEC. Trois conservateurs ont travaillé sur ce projet dont la réalisation a été effectuée dans les ateliers loidais de Pascale Brenelli pour 7000 €.
Ils sont sélectionnés en fonction de leur spécialité et du support concerné (céramique, papier, huile…) et doivent forcément être agréés Musée de France. Ils travaillent pour la plupart dans la grande région Atlantique. Nous procédons à une mise en concurrence et avant toute décision une commission scientifique se réunit puis la Drac donne son accord.
Quel message voudriez-vous délivrer à de futurs mécènes qui voudraient faire bénéficier le musée de leur soutien ?
Donner pour l’acquisition ou la restauration est valorisant pour un mécène. Il nous donne la possibilité de mener à bien notre mission régalienne d’enrichissement de notre fonds sur les thématiques abordées, de transmission, et de médiation. Plus nos collections se développent, plus nous sommes à même de construire un discours accessible par tous. Il assure également la pérennité de diffusion et de conservation d’une œuvre en la faisant entrer dans les collections d’un musée de France.
Nous avons souvent des propositions de don direct. Cependant, nous n’avons pas vocation à tout accueillir. Nous venons de recevoir le portrait d’un « prêtre réfractaire » très intéressant pour nous qui vient de partir en restauration, financée par l’Aamec. Parallèlement, un particulier a exercé une certaine pression pour me faire accepter un tableau dont le thème n’était pas attrayant, car nous en possédions déjà plusieurs dans nos collections. Cela peut paraître choquant pour un donateur mais les musées n’ont pas vocation à tout recueillir. Leurs réserves et les budgets ne sont pas extensibles ! Le musée de Saint-Martin conserve 15 000 objets et documents, hors bibliothèque (5000 ouvrages) et archives (32 mètres linéaires) alors que nous n’avons la possibilité de n’en exposer en permanence que 500 !